Groupe de réflexion de militants socialistes

Débattre avec les jeunes ?

Posted: dimanche 21 février 2010 | Publié par Jeunes et Précarité | Libellés : 0 commentaires

Jeudi 11 février, nous avons proposé à Marylise Lebranchu et Forough Salami, toutes les deux candidates aux élections régionales, de débattre dans un café avec de jeunes brestois.
C’était une première pour le JEP, et nous avons été heureux de profiter de l’expérience du MJS pour l’organisation de ce rendez-vous. Voilà déjà au sein de nos formations politiques la preuve que nous pouvons mêler efficacement les savoirs des différentes générations !

Marylise Lebranchu, député du Finistère et Paul Méhu, secrétaire fédéral du MJS 29.

Malgré la quantité de tracts et d’affiches distribués, une douzaine de jeunes seulement pouvaient se réclamer d’aucune formation politique proche du parti. Les autres, une vingtaine, étaient membre de l’UNL, du MJS ou de syndicats étudiants.
Première difficulté donc de mobiliser ce public qui n’a plus confiance dans les partis politiques.

Que nous ont-ils appris ce soir là ?

1- Ils étaient ravis qu’enfin un tel débat puisse avoir lieu dans un café plutôt qu’à une tribune officielle. Et pourquoi le faire seulement maintenant ? nous ont-ils reprochés.

2- Ils se sont fâchés lorsque toute à son discours Marylise ne s’est pas rendue compte que son public décrochait, peu intéressés par les enjeux de la mise en concurrence des compagnie aériennes… Question lancée par un participant, jeune stewart au chômage, mais qui a vite débouché sur un long monologue, passionné, documenté, et sans rapport aucun avec les préoccupations des autres auditeurs.
Voilà une des raisons qui les éloigne de nous : nos propos ne leurs paraissent pas suffisamment concrets et ils se méfient des beaux discours bien argumentés qui ne débouchent pas sur une amélioration de leur quotidien.

3- Ils veulent qu’on entende leur préoccupations immédiates, en matière d’emploi, de transport et de logement. Ce pour quoi Forough a pu répondre que le Conseil Régional avait déjà pris une série de mesures très concrètes, que les colistiers de Jean-Yves Le Drian avaient bien l’intention de poursuivre et d’amplifier.
Pour autant a-t-elle ajoutée, il ne s’agit pas de tout attendre d’élus qui ne disposent que d’un milliard d’euros pour stimuler le développement économique de toute une région. Impossible avec ce budget de résoudre les difficultés de tous et dans tous les domaines, ce serait un mensonge que de le prétendre.

4- Ils ont demandés pourquoi il n’y avait pas de jeunes sur les listes du PS. Marylise a été très claire sur ce point : elle ne veut pas de « jeunes-alibis » parmi les candidats, là encore ce serait malhonnête. Elle a souligné le risque que représentait pour un jeune encore en formation l’entrée précoce dans la vie politique en tant qu’élu. Risque de ne pouvoir terminer ses études compte tenu du temps que requiert l’exercice d’un mandat, risque de devenir dépendant d’un parti pour assurer sa subsistance car comment gagner sa vie à l’issue du mandat à moins d’en briguer un autre ou de se faire recruter comme assistant par un autre élu ? Pour Marylise c’est ainsi que l’on fabrique des apparatchiks.

5- Mais alors comment peuvent-ils défendre leurs intérêts ?
Ils ont revendiqués les formes d’actions qu’ils affectionnent : regroupement en collectifs autonomes, occupations de locaux suivant l’objectif poursuivi : Mission Locale, Squats, Mairie… Ils ne comprennent d’ailleurs pas que nous ne les rejoignions pas dans ces formes de lutte politique.
Peu disposée à se faire donner une « leçon de lutte » (sic) par de si jeunes gens, Marylise a rappelé le contexte légal qui entourait l’occupation de locaux privés. Se mettre dans une situation à la limite de la légalité peut conduire aux tribunaux, avec des responsabilités énormes, en cas de dérapage ou d’accident (incendie, décès…) comme elle en a fait l’expérience dans le passé en tant que Maire de Morlaix.

6- Ils pensent échapper à l’endoctrinement à s’organisant en collectifs. Ils sont face à ce paradoxe : préserver leur liberté de pensé, leurs différences et leurs intérêts individuels tout en s’appuyant sur le groupe pour faire entendre cette multitude de demandes personnelles. L’inconvénient est qu’en réglant au cas par cas les difficultés d’une poignée d’individus ils ne touchent pas à la structure du système économique qui les a plongés dans cette situation. En refusant de reconnaître leur appartenance à un vaste système socio-économique, ils ne peuvent pas développer une analyse et des solutions valables pour le plus grand nombre.

Que retenir de cette expérience ?

Les jeunes présents ce soir là se sont vu opposer des réponses précises et argumentées à leurs interrogations. Du point de vue du fond, pas de regret, mais sur la forme on peut craindre qu’un discours trop magistral, trop complexe ne leur ait pas laissé le temps d’assimiler les arguments, les noyant au contraire sous un déluge de savoir, suivant un modèle scolaire qui leur répugne particulièrement.

Un véritable débat avec les jeunes suppose que l’on répartisse équitablement les temps de parole et que l’on reconnaisse leurs modes de pensées, sans imposer les écrasantes joutes oratoires auxquelles des élus expérimentés tels que Marylise Lebranchu sont rompus. Exercice difficile, car il s’agit aussi de résister à l’agressivité et aux reproches qui ne manquent pas nous être adressés dès lors que nous nous réclamons d'un parti politique. Reste que si nous voulons VRAIMENT écouter ce que les jeunes ont à nous dire, il faudra accepter de nous taire un peu plus, simplement pour qu'ils puissent parler...